Histoire de la Géologie

Le Permien aux confins du Rouergue et de l'Albigeois


Le Permien du Sud-Ouest du Massif central affleure sur les bordures est et nord du bassin de l’Albigeois où les « Grès bigarrés » sont cartographiés par Dufrenoy et Elie de Beaumont (1841), mais confondus avec les autres dépôts triasiques.

De Boucheporn (1848) place ces couches dans le « Grès rouge » sans apporter de précisions stratigraphique.

Magnan (1869) les rapproche de « l’étage Rothe-todte-liegende » et les sépare, sur ses coupes, des « argiles bigarrée » triasiques. Mais sa stratigraphie reste confuse et une erreur d’interprétation tectonique l’amène à prendre pour du Permien marin (« Zeichstein »), le Lias inférieur du plateau de Tonnac. Cette découverte qui allait déjà à l’encontre de la carte de Boucheporn est contestée par Péron (1874) qui corrige la stratigraphie du Permien et expose son interprétation tectonique de la Grésigne.
Lui-même tombe dans le même travers car des accidents lui font croire, à tort, à la discordance « des couches liasiques inférieures sur les grès blancs redressés du Trias ».

Etudiant le Permien, plus complet, de la vallée du Cérou qui prolonge à l’Ouest les affleurements du houiller de Carmaux, et celui de Réalmont, Bergeron (1889) distingue deux ensembles superposés, des « Schistes gris », qu’il place dans son nouvel étage autunien, et des « grès rouges », qu’il rapproche, comme ses prédécesseurs de l’étage Rotliegende.

Caraven-Cachin (1898) adopte la même subdivision et distingue dans cet étage, qu’il nomme alors Saxonien, trois ensembles lithologiques superposés qui soulignent la disposition anticlinale de la Grésigne.

Thévenin (1903) reconnaît les deux ensembles « gris » et « rouge » respectivement attribués aux étages Autunien et Saxonien, par analogie aux bassins de Brive ou de Rodez. Comme ses prédécesseurs, il n'apporte aucune preuve paléontologique à l’appui de ce découpage.


Etudes récentes

Les premières datations sont apparues sous l’impulsion de Pierre Vetter, dans les années 70. Des associations de macro- et de microflores apportent la preuve de l’âge Autunien de la « série grise » de la vallée du Cérou, de Najac et de Réalmont (Mazaud et Vetter, 1976).

Debrand-Passard et Greber (1975), puis Broutin et al. (1983) montrent les fortes affinités stéphaniennes de ses couches conglomératiques les plus inférieures.

La recherche pétrolière et les nombreux sondages allaient reconnaître le Permien sous le Tertiaire de l’Albigeois (Lavaur, 1957) et sous le Mésozoïque du Quercy (Atlas de l’Aquitaine, 1974) et, surtout,  montrer les indices d’un bassin permien beaucoup plus vaste que ne le laissaient supposer les affleurements, suggérant l’existence d’un bassin unique étendu de Brive à l’Albigeois.
Un sondage (COPEFA, Ligneris, 1961) effectué au cœur du dôme de la Grésigne, tend à le confirmer en traversant le Permien sur plus de 3000 m, sans atteindre le substratum paléozoïque. Selon G. de Ligneris, le forage aurait traversé le "Saxonien" rouge sur au moins 2500 m, et atteint une formation brune, « probablement stéphanienne » dans laquelle des argilites noires ont fourni une flore probablement stéphanienne : Pecopteris polymorpha, P. cf. bioti, P. densifolia, Procordaites linearis, Sphenophyllum oblongifolium.

Succession lithologique des formations permiennes traversées par le sondage COPEFA
de la Grande-Baraque, d'après Durand-Delga (1979, fig. 7)


Toujours dans le Massif de la Grésigne, cette fois par l’étude des affleurements, Fabre, dans sa thèse (1971) et Durand-Delga (1979), montrent qu’à l’extrémité occidentale du dôme, les grès rouges à faciès saxonien sont surmontés par un complexe gréso-conglomératique grossier, puis par un complexe argilo-pélitique rouge à lentilles gypsifères. Dans ces gypses, les « Gypses de Merlin », déjà reconnus par Péron (1873) et Caraven-Cachen (1898), Durand-Delga (1979) voit les traces méridionales des lagunes du Zechstein de l’Europe du Nord. Cette hypothèse suggère un âge thuringien à ces dépôts.

Le Permien affleurant du Massif de la Grésigne, par Fabre (1971)

Delsahut (1981) aborde l’étude des molasses post-hercyniennes sous un angle sédimentologique et géodynamique. Il donne la synthèse la plus aboutie du Permien de l’Albigeois.
Il découpe la « série grise » en quatre ensembles lithologiques discordants sur le Stéphanien inférieur phytogène :
- Un ensemble gréso-conglomératique rosé, Autunien basal, à microflores d’affinités ambiguës, intermédiaires entre le Stéphanien supérieur et l'Autunien ;
- Un ensemble gréso-pélitique gris, Autunien inférieur, bien daté par sa flore à Callipteris et sa microflore ;
- Un ensemble gréso-pélitique gris et rouge, Autunien moyen, peu fossilifère, quelques Lebachia piniformis ;
- Un ensemble rouge, Autunien supérieur ou Autunien rouge, caractérisée par l'apparition de nouvelles espèces d'Odontopteris et un grand nombre de lebachia piniformis.
Ce dernier ensemble ne serait présent que dans le secteur de Najac. Partout ailleurs, il y aurait une lacune de l’Autunien supérieur et du Saxonien inférieur.
La « série rouge » sus-jacente, qui n’a fourni aucun fossile caractéristique, est partout attribuée au Saxonien.

Dans le massif de la Grésigne, Delsahut reprends l'interprétation du sondage de la Grande-Baraque et montre que la coupure lithologique principale se situe à 2580 m de profondeur, entre une série détritique uniformément rouge à faciès saxonien, et un ensemble gréso-pélitique gris et rouge possiblement discordant, dont le faciès évoque l'Autunien moyen. Les macroflores anciennement citées à 2590 m sont banales, seules les microflores évoqueraient bien l'Autunien. L'Autunien supérieur serait absent. Le sondage n’a pas atteint le Stéphanien.

A Réalmont, la discordance du Permien rouge sur, à la fois l’Autunien et le Stéphanien inférieur, serait à relier avec un dernier contrecoup de la phase palatine. Le Thuringien pourrait y être représenté, pour sa partie supérieure conglomératique.

 

 Stratigraphie des dépôts du Stéphano-permien du bassin de Réalmont.
D’après Delsahut (1981), modifié

Son esquisse paléogéographique montre que la « série grise » de l’Autunien déborde largement les cuvettes stéphaniennes et comble l’ensemble du grand bassin Nord-Aquitaine (Bassin Quercy – Grésigne – Albigeois). Les dépôts de la « série rouge » du Saxonien sont plus localisés et semblent remplir des bassins résiduels très subsidents comme le suggèrent les épaisseurs considérables de dépôts anté-triasiques accumulées sous la Grésigne et le Quercy.

Bibliographie :

Bibliographie du Carbonifère et du Permien du Tarn. Ce site

Un bassin stéphano-permien méconu. Le Bassin de Réalmont. Carrefour tectonique entre massif central et Bassin d'Aquitaine. Ce site.

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