Biographies

Léon Carez, géologue (1854 – 1932)


Curieusement et en dépit de sa notoriété scientifique et des responsabilités importantes qu’il assuma dans le microcosme géologique du début du 20ème siècle, il n’a pas été possible de trouver une notice nécrologique de Léon Carez. Nous devons nous contenter pour approcher cet éminent personnage, du rapport de Marcellin Boule, écrit lors de l’attribution du prix Prestwich (1909) par la Société géologique de France.

Licencié en droit avant de devenir l’élève d’Edmond Hébert, ses premières publications portent sur la géologie du Bassin de Paris et datent de 1876. En 1881 il soutient une thèse de doctorat ès sciences intitulée « Etude des Terrains crétacés et tertiaires du nord de l’Espagne ». Cette monographie couvre le versant sud des Pyrénées, de Barceloneà Bilbao et ses observations sont résumées sur une « carte géologique provisoire ». Puis, de 1882 à 1889, il se consacre à l’étude des terrains secondaires de la basse vallée du Rhône.

Conscient de l’insuffisance de la cartographie géologique il s’associe à G. Vasseur (1855-1915) et entreprend la publication d’une Carte géologique de la France à 1/500 000e, allant jusqu’à dessiner personnellement 31 des 42 cartes qui la constituent ; enfin il assure, sans l’aide d’aucune subvention, sa réalisation. Cette carte parait en 1889.

Notaire de profession, il utilise ses clercs à des tâches scientifiques. Ainsi, il prendra à sa charge l’Annuaire géologique universel, édité par le Dr Dagincourt, et de 1887 à 1897 ; il en assure la direction et transforme cette revue en une vitrine des différentes branches de la géologie de la fin du XIXème siècle.

Après avoir occupé diverses fonctions au sein de la Société géologique de France (secrétaire, trésorier, vice-président) et avoir assumé la direction d’une réunion extraordinaire dans les Corbières (1892), il en devient Président en 1901.

Géologue pyrénéen, il produit un nombre important d’articles et de relevés cartographiques publiés à la Société géologique de France et au Bulletin du Service de la Carte géologique de la France.
Son oeuvre la plus colossale, élaborée de 1903 à 1909, sera l’ouvrage sur la « Géologie des Pyrénées françaises » composée de 6 volumes totalisant plusieurs milliers de pages. On y trouve, d’une part, l’état des connaissances sur la chaîne, d’autre part, des études détaillées sur sa structure.
Léon Carez s’y montre opposé à la théorie des nappes développée par Léon Bertrand sur le versant septentrional des Pyrénées. Il considère pour sa part une organisation en « compartiments distincts, séparés les uns des autres par des failles souvent verticales, très longues, mais n’ayant que tout à fait exceptionnellement cheminé sur des étendues notables » … « l’allure des différents compartiments étant généralement celle d’écailles ne présentant pas de flanc renversé. » (M. Boule, 1909) ; autant d’idées qui seront deux décennies plus tard à l’origine des recherches de l’école toulousaine de C. Jacob.

A son décès, survenu en 1932, la Société géologique de France ne lui consacrera que quelques lignes, le minimum que pouvait faire cette institution pour ce géologue présenté quelques années plutôt comme un «citoyen éclairé, indépendant, sans fonctions officielles, aimant la science pour elle-même et non pour les avantages matériels ou les honneurs qu’elle peut procurer ».


* Portrait tiré de l’ouvrage d’E. de Margerie « Critique et Géologie. Contribution à l’histoire des sciences de la terre» (1943-1946), t. 3, Paris - Armand Colin éditeur.

 

Michel Bilotte, 2010